La communication et le marketing bientôt tokenisés ?
Vous avez 2 millions d’abonnés LinkedIn, bravo ! Mais qu’en faire ?
Les exporter dans votre CRM pour les adresser de manière personnalisée ? Pendant un temps, LinkedIn avait ouvert une brèche facile… qui permettait à n’importe qui de le faire. Depuis, ils ont fait une correction. C’est toujours possible, mais très compliqué et éventuellement irritant pour ceux qui vous ont confié leur identité.
Au sein de LinkedIn, il vous reste quelques solutions.
Accroître votre portée organique, sans doute. Mais dans une mesure somme toute limitée, qui dépend largement de l’agrément de vos abonnés les plus interactants, de l’acquisition de nouveaux abonnés (dans tous les cas, on parle d’une portée qui est à peine supérieure à 2 %) et des fréquentes évolutions de l’algorithme.
Une cible de paid, plus vraisemblablement (le paid sera bientôt ouvert aux comptes de particuliers), mais assez coûteux dans un monde monopolistique.
Reste l’opportunité de développer les interactions avec ceux d’entre eux qui sont dotés du plus gros potentiel (difficile à industrialiser dans la mesure où la robotisation n’est pas vraiment dans l’étiquette du réseau) et les intrusions via les messages privés. Bref, beaucoup de choses, mais qui restent contraintes par l’appropriation des données par les plateformes et l’opacité de leurs moteurs.
C’est là qu’intervient la révolution du Web 3.0
Une numération qui retrace une histoire : le Web1 marque la connexion des documents et des contenus entre eux grâce aux liens hypertextes et au référencement des moteurs de recherche. C’est le temps de l’information.
Le Web2 s’ouvre avec les réseaux sociaux. C’est l’ère de la connexion entre les personnes.
Avec le Web3, on entre dans l’internet de l’échange grâce à un modèle basé sur les blockchains et les cryptomonnaies et non plus seulement sur les données des utilisateurs.
Au cœur de ce système : le token.
Le token est un actif numérique émis et échangeable sur une blockchain, donc une sorte de cryptomonnaie cessible entre utilisateurs. L’idée centrale : les personnes morales ou physiques échangeront de la donnée (des avis, des recommandations, des souscriptions, bref, des engagements de toutes sortes) – que la blockchain authentifiera, sécurisera et dont elle garantira la propriété – contre du service.
De nombreux cadres d’utilisation existeront, comme récompenser les salariés d’une entreprise, récompenser les membres actifs d’une communauté, par exemple ceux qui acceptent de tester ses produits et ses solutions en leur offrant des avantages lors de leur mise sur le marché…
Comme l’explique Caroline Faillet, une remarquable experte du sujet : « Aujourd’hui, en effet, on bosse pour Facebook. On y produit des contenus, on like, on paie des services, mais toute la valeur profite à Facebook. C’est une aberration économique. Créateurs, communautés, investisseurs et annonceurs commencent à en voir les limites à force de toujours mettre plus d’argent et de contenus. Avec le Web3, on est dans le registre d’un échange de données consenti et contrôlé, qui peut même être rétribué en tokens. On sort du modèle ultra-captif des plateformes actuelles. »
Et de prendre un exemple très parlant : « Actuellement, quand une personne dépose un avis Google sur un restaurant, elle n’est pas rétribuée. Or, elle a pourtant apporté une information utile. Avec le Web3, cette approche n’existe plus. Au Japon, la start-up SynchroLife a repris l’idée de ces avis gastronomiques. Chaque contribution déposée sur la plateforme est récompensée avec des actifs cryptographiques qui, une fois accumulés, peuvent être dépensés dans d’autres repas. Favoriser et adopter ce type d’alternative constitue un levier pour contourner les plateformes existantes et cesser de les nourrir gratuitement avec nos données. »
Si l’on prend le tunnel de conversion, on imagine aisément la manière dont la tokenisation interviendra tout au long de la chaîne pour attirer, convertir, engager et fidéliser. Il faudra toutefois éviter de marchandiser (mercenariser ?) toutes les relations entre les entreprises et leurs clients et ne pas entacher la confiance de ceux qui ne le sont pas encore : d’accord pour embarquer les clients dans un programme d’advocacy en les rémunérant par des tokens qu’ils pourront échanger contre de la connaissance, des rencontres avec des experts, moins s’ils les monétisent contre des avantages prix. D’accord si, en amont de la création d’un produit ou d’une solution, des tokens rémunèrent les insights de groupes de consommateurs et leur permettent un accès moins coûteux ou premium à « leur » création (une sorte de rémunération du risque), moins si cela incite à un « banal » cross sell. Les tokens doivent faire vivre des communautés d’intérêt, pas un système classique et modernisé de points.