Salariés déconnectés : loin des yeux, loin du coeur ?
Au niveau mondial aujourd’hui, 4 salariés sur 5 travaillent sur le terrain, c’est-à-dire qu’ils ne sont pas assis à un bureau mais dans une boutique, une usine, un site de production, sur les routes etc. La pandémie a permis de les identifier comme « essentiels », par opposition aux fonctions tertiaires et support, mais comme ils travaillent sans PC, smartphone et parfois sans adresse e-mail, ils sont souvent les laissés-pour-compte de la communication interne corporate.
Qu’on les appelle déconnectés, frontliners ou deskless, les salariés de terrain connaissent des situations très hétérogènes en matière de connexion aux outils corporate. Certains ont une adresse e-mail professionnelle mais n’ont pas d’accès à un ordinateur pendant leur journée de travail, comme les managers dans des usines ou sur des chantiers. D’autres n’ont pas d’adresse e-mail professionnelle mais ont accès sur leur lieu de travail, à certains moments, à un ordinateur connecté au réseau de l’entreprise, comme souvent dans les boutiques. Enfin, certains salariés sans e-mail, sans téléphone portable professionnel et sans ordinateur, sont complètement coupés des outils corporate, comme les manutentionnaires ou ouvriers sur des sites de production.
Salariés déconnectés, ou salariés déconnectés du discours de l’entreprise ?
Quelle que soit la variété des situations, une chose est sure : ces salariés ne sont pas déconnectés. A titre personnel, 77% des Français ont un smartphone et 76% sont actifs sur les réseaux sociaux. S’il y a une déconnexion, ce n’est pas entre les salariés de terrain et les outils de communication contemporains, mais plutôt entre le terrain et le discours d’entreprise. Workplace by Facebook a mené une grande enquête sur les deskless workers, dont il ressort que seulement 13 % des employés basés sur le terrain se sentent connectés à leur siège social. En conséquence de quoi, ils ne se sentent ni entendus, ni légitimes à s’exprimer. De l’autre côté de la barrière, les managers sont 85% à déclarer comprendre l’importance des travailleurs de première ligne… un écart qui en dit long sur le manque de prise en charge du problème.
Il revient aux Directions de la Communication de trouver les moyens de se connecter à cette partie de leurs effectifs, si essentielle à la santé et à la prospérité de l’entreprise. Exclure les salariés de terrain de la communication corporate, c’est évidemment un risque RH (baisse de la satisfaction au travail, turn-over accru, absentéisme, sécurité des employés…) mais aussi un risque business (baisse de productivité, satisfaction clients…) pour les entreprises.
Pourquoi la tâche est-elle ardue ?
Les salariés ont peu de temps. Et c’est d’autant plus vrai quand ils sont sur le terrain : ils doivent souvent fournir un résultat, que cela soit le nombre de produits fabriqués, de clients servis ou de kilomètres parcourus. Pris dans l’opérationnel, ils n’ont pas beaucoup de temps à accorder à une communication corporate qui ne les aide pas à améliorer leurs résultats. La pertinence de l’information fournie est clé pour ce public, très focalisé sur l’accomplissement des missions quotidiennes et moins sur la vie « institutionnelle » de l’entreprise.
Il n’y a pas de technologie miracle. D’une part, on peut trouver dans une même entreprise des niveaux de connexion / déconnexion très variés, ce qui rend difficile de proposer une solution unique et identique pour tous et toutes. D’autre part, pour les entreprises implantées à l’international, les pratiques culturelles hétérogènes d’un pays à un autre constituent une difficulté : popularité des outils (par exemple WeChat en Chine), acceptabilité de l’idée d’une connexion sur son temps et/ ou sur son device personnel (méfiance des organisations syndicales en France)…
Quelques pistes
1. Capitaliser sur l’humain
Le premier lien du salarié à l’entreprise, c’est son manager. Renforcer l’animation de la communication managériale et souligner auprès des managers l’importance stratégique de leur rôle de relais est une idée pertinente pour 3 raisons :
- vous vous assurez ainsi d’une communication corporate diffusée de manière homogène dans l’entreprise,
- vous laissez la main aux managers sur la façon dont ils délivrent les messages essentiels et vous vous appuyez ainsi sur leur connaissance du terrain pour gagner en impact,
- vous bénéficiez de remontées du terrain pour connaître les thèmes et informations qui intéressent ou non les équipes.
2. Miser sur la valeur sure du print
Pour s’adresser à des salariés qui ont un accès partiel ou limité aux outils digitaux, quoi de mieux que le print ? Sous un format magazine (qui peut être mis à disposition des salariés dans leurs lieux de passage), ou sous forme d’affiches pour des campagnes d’informations ponctuelles, le print apporte la garantie que les salariés accèdent aux informations essentielles concernant l’entreprise. Les magazines permettent en outre de sortir de la temporalité du quotidien et de ses contraintes : c’est un objet que l’on peut rapporter chez soi, pour le feuilleter ou le lire à un moment opportun.
3. Laisser le choix aux salariés de se connecter via leurs devices personnels.
De nombreux salariés, notamment chez les plus jeunes, ont déjà l’habitude de suivre l’activité de leur entreprise sur leur téléphone personnel. Ils la suivent via les outils de communication externe, notamment les comptes de l’entreprise sur les réseaux sociaux. Dès lors, pourquoi ne pas offrir à ceux qui le désirent la possibilité de télécharger sur leurs téléphones personnels le réseau social d’entreprise ou son intranet (ou autre canal de communication interne) ? Une façon simple et en phase avec les pratiques actuelles de maintenir le lien entre le corporate et les salariés de terrain.